Mars est là et avec lui le printemps qui arrive. Lorsque j’écris ici ces quelques lignes à l’usage des grognards et de nos lecteurs, je pars en voyage imaginant que ces quelques phrases peuvent être lues à l’autre bout du monde. Alors parfois mon cœur s’emballe comme un navire sur les flots. A l’intérieur le calfat doit s’acharner à frapper l’étoupe des coups réguliers de son marteau. Ce doit être cela, ce que j’entends lorsqu’il bât. Notre site est aussi une invitation au voyage comme un train dans une gare ou les mâts de bateaux dans les ports dont les drisses claquent sous la bise légère. Il offre un voyage à travers l’Histoire de notre belle France et nous n’avons pas à en rougir quoiqu’en disent certains détracteurs, soi-disant bien-pensant ou quelques pisse-copie qui firent un doctorat en Histoire au café du commerce.
Dans le calme de mes murs, je vais donc reprendre mon calame en faisant l’effort de me relire et d’essayer de corriger ma syntaxe afin d’éviter les mots qui manquent, les cacographies, les haplographies et les lapsus calami. XXIe siècle oblige, ce ne sera qu’un courrier électronique sur un bête fond d’écran. Ca me désole un peu et j’aurais aimé vivre jadis, il y a quelques siècles, et avoir pu écrire sur un coûteux vélin, un parchemin ou même un palimpseste, user d’une plume d’oie bien taillée et d’encre maison, fabriquée à base de pigments locaux et même de vin comme cela se faisait.
Je n’aurais sans doute pu à cette époque là. Mais, c’est mon côté vieille France qui ressort, celle des lettres et des lumières, celle de Rousseau et de Mirabeau, de Voltaire et de Molière. C’est que j’aime mon pays, même avec tous ses défauts, et ceux de chez nous qui le critiquent, qui crachent sur nos couleurs, n’ont pas connu le fait d’être seul à arpenter des chemins qui ne sont plus les leurs à l’autre bout de la Terre. Il faut avoir été sevré de toutes les paroles que prononçaient nos pères et nos mères pour comprendre que ce qui reste lorsque nous sommes seuls, loin, sur une terre étrangère, ce sont les couleurs de l’étoffe de soie que contiennent les plis de ce que nous appelons un drapeau. Peu de chose en fait, rien d’autre qu’un symbole, un point de ralliement.
En ce moment, c’est un temps de pause pour les grognards et nous conjuguons au présent le verbe le plus irrégulier de la langue française : « tambourer ». C’est un impératif ! « J’écris, tu présides, il dirige, nous répétons, vous jouez, ils applaudissent ». Encore et toujours le travail du vendredi soir. C’est notre récréation. Sous la direction avertie de José qui parfois s’énerve un peu. Alors, on a parfois un réveil pénible. « J’ai voulu être diplomate, éviter que le sang coule à cause de vous tous. Je vais vous travailler en férocité, vous faire marcher à coups de latte. A ma pogne que je veux vous voir et vous demanderez pardon et au garde-à-vous ». Houlala ! Quand José s’énerve, faut faire le dos rond et dire oui à tout « qu’est ce qui dit ? ».
C’est le temps des propositions de concerts, des demandes de participations qui entrent et sortent comme elles sont venues. Hélas, bien souvent il faudrait jouer gratuitement. C’est méconnaître honteusement tout le travail nécessaire qu’il faille pour faire un musicien, pour offrir un spectacle de qualité, et faire fonctionner notre petite association. Comme nous l’avait fait remarquer Monsieur SCHMITT, patron du restaurant « au Soldat de l’An II » à Phalsbourg et que je recommande : « Il faut deux heures pour faire un foie gras, dix ans pour faire un musicien ».
Aujourd’hui, il fait beau et un timide soleil printanier commence à nous darder de ses pâles rayons. L’air reste cependant très frais encore et les cheminées crachotent ça et là quelques fumées grises et fuligineuses. Il fait encore froid et les manteaux comme les tricots sont encore de mise. Tout est calme dans ma campagne paisible. Pas un bruit, pas un oiseau ne vient troubler l’air de ma vallée rhénane, coincée entre les Vosges et la Forêt-Noire. Déjà, cependant, des volutes d’insectes tourbillonnent devant le perron de ma porte. Ils forment d’aériennes virgules et c’est un signe indéniable de ce printemps que nous attendons avec patience. C’est pour le 20 mars à 23 heures 20. Il arrive inexorablement tant la course de notre Terre autour de notre étoile est régulière et indifférente à nos petites misères, à nos espoirs et nos petits bonheurs.
Campagne